Mozilla a tiré la sonnette d’alarme vendredi, affirmant que Firefox pourrait tout simplement — cesser d’exister — si le tribunal acceptait l’ensemble des mesures proposées par le département américain de la Justice (DOJ) contre le monopole de Google dans la recherche en ligne.
Parmi les propositions du DOJ : interdire à Google de payer pour devenir le moteur de recherche par défaut sur des navigateurs tiers comme Firefox, forcer la vente de Chrome et obliger Google à fournir ses résultats de recherche à ses concurrents.
90% des revenus de Mozilla proviennent de Google
Le tribunal a déjà reconnu que Google détenait un monopole illégal, en grande partie grâce à ses accords d’exclusivité, qui bloquent les moteurs concurrents.
Mais ces propositions risquent de frapper de plein fouet Mozilla, qui dépend à 85 % des paiements de Google pour faire de Google le moteur de recherche par défaut de Firefox. Au total, 90 % des revenus de Mozilla proviennent de Firefox, selon Muhlheim.
« Perdre cette source de revenus d’un coup signifierait des coupes budgétaires drastiques dans toute l’entreprise », a-t-il averti. Cela entraînerait une spirale négative, avec moins d’investissements dans le développement de Firefox, le rendant moins compétitif — et potentiellement condamné à disparaître.
Un paradoxe : protéger la concurrence pourrait nuire aux concurrents
Muhlheim souligne l’ironie de la situation : ces mesures antitrust, conçues pour rétablir la concurrence, pourraient en réalité consolider la domination de Chrome, en supprimant l’un de ses rares concurrents viables.
Le moteur de Firefox, Gecko, est le seul moteur de navigateur important qui n’appartient pas à une grande entreprise technologique. Les autres moteurs sont Chromium (Google) et WebKit (Apple). Mozilla avait créé Gecko pour éviter qu’une seule entreprise — à l’époque Microsoft — ne contrôle l’accès au web.
Pourquoi Bing ou Yahoo ne peuvent pas sauver Firefox
Trouver un remplaçant à Google n’est pas aussi simple qu’on pourrait le croire. Mozilla a discuté avec Microsoft d’un éventuel partenariat autour de Bing, mais deux problèmes se posent :
- Sans mise en concurrence avec Google, le contrat générerait moins de revenus.
- Bing monétise moins efficacement le trafic que Google, selon les tests de Mozilla.
Une étude menée entre 2021 et 2022, où Mozilla a discrètement remplacé Google par Bing comme moteur par défaut, a montré une forte baisse de revenus.
Un test similaire mené avec Yahoo entre 2014 et 2017 avait aussi mal tourné : les utilisateurs ont abandonné Firefox en masse.
Des alternatives, mais trop tardives
Le DOJ espère que ses mesures créeront un écosystème plus concurrentiel, avec davantage de moteurs de recherche viables à l’avenir. Mais cela prendrait du temps, trop de temps pour Mozilla, qui devrait réduire ses équipes et revoir entièrement sa stratégie en attendant un futur hypothétique.
Mozilla soutient les écrans de choix de navigateur (comme ceux proposés sur Android ou Windows), mais pas forcément un écran de sélection du moteur de recherche par défaut. Selon Muhlheim, Firefox rappelle régulièrement aux utilisateurs qu’ils peuvent en changer dans le navigateur.
🔗 Source : The Verge